Être conseillère et conseiller réno' copro
Interview croisée de 3 conseiller.es France Rénov’ experts dans l’accompagnement des copropriétés
La Métropole Aix-Marseille-Provence compte 403 800 appartements en résidence principale, situés majoritairement dans les villes de plus de 15 000 habitants, pour plus de la moitié à Marseille. Généralement construits avant 1975, un grand nombre de ces logements sont énergivores et inconfortables. Leur rénovation est un véritable enjeu pour atteindre les objectifs nationaux d’un parc résidentiel BBC à l’horizon 2050.
Sur le territoire métropolitain, deux structures agissent depuis 2016 auprès des copropriétés afin de les inciter au passage aux travaux et sécuriser ceux-ci.
L’Agence Locale de l’Energie et du Climat (ALEC) basée à Marseille et la Maison Energie Habitat Climat-CPIE (MEHC) basée à Aix en Provence disposent d’une équipe de 7 conseillerères et conseillers dédiés à l’accompagnement des copropriétés. Entre 2021 et 2023, 153 copropriétés ont été accompagnées par les équipes de l’ALEC (+ de 80% des accompagnements) et de la MEHC
Mais en quoi consiste précisément cet accompagnement ? et quels sont les enjeux sur le territoire ?
Rosita, Frédéric et Thomas font partie de l’équipe de conseillers et nous expliquent en quoi consiste cette mission et les enjeux qu’elle recouvre.
Propos recueillis et retranscrits par Virginie Vieri, chargée d’animation territoriale pour la MEHC.
Racontez vous … Vous êtes issus de quelles formations ? Comment êtes-vous arrivés à l’accompagnement des copropriétés ? Qu'est-ce qui vous anime dans cette mission ?
Thomas : J’ai obtenu le Master “Ingénierie physique des énergies” (Paris Diderot) et j'ai intégré la MEHC dans la foulée. Ma première mission consistait à accompagner les particuliers en maison individuelle. J’ai saisi l’opportunité de bifurquer sur les copropriétés car c’est plus complexe, il y a plus d'intervenants, plus de challenge, il y a un travail intéressant à faire pour convaincre.
Rosita : J’ai été commerçante, laborantine, agent immobilier et j’ai décidé de faire une reconversion. J’ai suivi la formation Asder “techniques et énergies renouvelables”.
J’ai intégré l’ALEC en 2012 et il fallait répondre à une demande politique sur ce sujet. Il y a eu un énorme travail en amont pour analyser l'écosystème, préparer les acteurs, simplifier et clarifier. C’est ce travail de pédagogie qui m’a donné envie d’aller sur la copropriété.
Fréderic : J’ai obtenu un Master “management de l’environnement valorisation et analyse (MAEVa) défi énergétique et réponse durable” (Aix Marseille en partenariat avec le CEA). J’avais mon bureau d’étude puis j’ai intégré l’ALEC. Accompagner les copropriétés c’est un défi. Il y a un aspect social très intéressant.
Quelles sont les compétences et savoirs nécessaires à votre mission ?
Frédéric : Nous sommes beaucoup attendus sur la technique car la copropriété est hors d'atteinte pour nombre d’acteurs. Ça demande également de solides compétences en management de projet. Parfois même des compétences d’acteur studio : il faut savoir se donner en spectacle lors d’une AG pour convaincre !
Rosita : Il y a un très gros travail de veille à faire pour être au fait de chaque changement…
Frédéric : Je confirme, si on regarde à la loupe les différents changements (maison individuelles et copropriétés confondues) entre les CEE, les subventions etc… Ça peut parfois changer toutes les 3 semaines !
Thomas : Il faut aussi connaître les différents moteurs de calculs. Par exemple, si l’on veut avoir 3 simulations différentes selon les résultats recherchés il faut jongler entre plusieurs modes de calculs…
Rosita : Oui selon les modes de calculs choisis on peut influencer la prise de décision ; sur un accompagnement copropriété on a des parcours types mais qui peuvent changer tous les 6 mois car le projet est mouvant.
Le parcours classique ne s'adapte pas forcément à toutes les copros. Il faut que l’on soit capable de s’adapter afin de faciliter la prise de décisions et c’est parfois ce qui complique la mission.
Thomas : c’est un métier multi compétences, l’idéal est de proposer des conseillers dont les compétences peuvent se compléter.
Quels sont vos rôles par rapport à tous les acteurs agissant sur un projet de travaux de rénovation en copropriété ?
Rosita : Nous apportons une autre compétence aux syndics, nous leur facilitons le travail. Ils peuvent s’appuyer sur nous comme acteurs de confiance.
Au début du parcours, nous expliquons comment le conseiller va accompagner et par quels moyens. On a une valeur ajoutée car on fait en sorte de mettre tout le monde d’accord.
Thomas : On se positionne en amont, on peut fournir un avis consultatif et guider sur les bonnes questions à se poser pour que la copro fasse son propre choix d’assistance à maîtrise d’ouvrage.
Fréderic : On a les compétences pour faire de l’AMO mais ce n’est pas le rôle des structures de Service Public de la Rénovation de l’Habitat. On ne se substitue pas au privé, nous devons garder un rôle de facilitateur,et assurer l’articulation des rouages.
Chaque acteur est complémentaire, nous accompagnons avec une vision macro alors que l’assistance à maîtrise d’ouvrage est sur du micro.
D’une voix : On agit pour le syndicat de copropriétaires dans le but de sécuriser le parcours travaux.
Quelles sont les principales difficultés auxquelles vous devez faire face ?
Rosita : La plus grande difficulté étant de faire raisonner en collectif, il y a de l’inertie qui est complexe à faire évoluer.
Thomas : Ce sont les individus qui font bouger les choses, si ces personnes motrices partent, ce qui fut le cas sur une de mes copropriété, le projet peut ne pas aboutir.
Quelles évolutions aimeriez-vous voir dans ce métier ?
D’une voix : Au-delà du métier de conseiller en lui-même, il faut que les décisions liées à la réglementation et aux aides soient raccord avec les réalités du terrain. Les législateurs doivent donner de la visibilité à l’ensemble des acteurs.
Frédéric : Nous aimerions avoir une meilleure reconnaissance de notre travail au regard de toutes les compétences que nous devons actionner, il faut une meilleure valorisation. J’en profite pour ajouter au passage la nécessité de rendre obligatoire la STD (simulation thermique dynamique).
Rosita : Il faut plus de concertation entre les acteurs de terrain des décideurs pour que les mesures soient cohérentes et un encadrement plus significatif de la part de l’Etat.
Une anecdote insolite sur un accompagnement copro à raconter à nos lecteurs ?
Fréderic : Une AG de copropriété dans un bar : il fallait lever la main gauche pour commander à boire et la main droite pour voter. Ou encore passer un projet de travaux d’1 million d’euros en 10 minutes alors qu’on avait parlé des boîtes aux lettres pendant plus d'une heure !
- Pour contacter nos conseillerères et conseillers copropriétés :
MEHC coproprietes@cpie-paysdaix.com
- Ressources retours d'expérience
Témoignage de Jean-Pierre, président du conseil syndical d'une copropriété marseillaise
https://www.youtube.com/watch?v=YvwkYrjWilU
Film de présentation de la Copropriété gagnante des Trophées réno’ copro métropole Aix Marseille Provence Résidence Les Cyprès (13) - rénovation avec près de 50% de gain énergétique
https://www.youtube.com/watch?v=6pV4xgYsUTA&t=2s